Maurice Ravel au piano (1912)

Maurice Ravel au piano (1912)

Eugene Istomin a longtemps joué Gaspard de la nuit, qu’il avait découvert grâce à un disque de Gieseking. Il avait même demandé une traduction des poèmes en prose d’Aloysius Bertrand à Paul Goodman, pour les inclure dans les programmes de ses concerts. Il avait une telle passion pour cette œuvre que lors d’un concert avec le New York Philharmonic, dans l’immense Lewisohn Stadium, il osa jouer Ondine en bis après le Concerto l’Empereur ! Il mit également Gaspard de la nuit au programme de deux de ses récitals à Carnegie Hall, le 20 février 1948 et le 8 avril 1964.
récital Gaspard 1964 rectoIl joua aussi les Jeux d’eau, et les reprit pour lui-même dans les années 80. Cela le « détendait » tandis qu’il travaillait le Quatrième Concerto de Rachmaninov. Même s’il ne l’a jamais joué en public, il connaissait bien le Tombeau de Couperin et il en fera le sujet de plusieurs master-classes. Les Valses nobles et sentimentales lui étaient éminemment familières. Il les avait fait travailler à son amie Shirley Gabis quand ils étaient ensemble au Curtis. Elle les jouait tout le temps et il ne voulut pas lui faire de concurrence en les jouant aussi. Il pensait les reprendre un jour, mais il n’en trouva pas l’occasion.

récital Carnegie Hall Gaspard 1964Istomin avait joué pour la première fois le Trio de Ravel en 1961 à Marlboro (avec Arnold Steinhardt et Madeline Foley). Il avait ensuite convaincu Isaac Stern et Leonard Rose de préparer l’œuvre pour leurs premiers concerts en Israël quelques semaines plus tard. Ils le jouèrent régulièrement dans les années 60 et en commencèrent l’enregistrement. Mais Istomin avait le sentiment que cela ne sonnait pas assez ravélien, que cela n’allait pas être la version de référence que tout le monde attendait d’eux. Ils renoncèrent à publier le disque et retirèrent l’œuvre de leur répertoire.
Istomin aimait beaucoup les deux concertos de Ravel, mais il n’envisagea jamais de les jouer. Ce n’était pas une musique où il sentait qu’il aurait eu quelque chose de différent, de vraiment personnel, à apporter.

Document

Gieseking joue Ondine (l’enregistrement de 1937 qui permit à Istomin de découvrir Gaspard de la nuit)