Amelita Galli Curci

Amelita Galli Curci

Toute l’enfance d’Istomin fut bercée par les chants de ses parents, essentiellement des chansons populaires russes qu’ils chantaient pour leur plaisir ou pour préparer leurs prestations dans les cabarets. Ses parents aimaient aussi l’opéra italien et ils achetèrent, dès qu’ils en eurent les moyens, des 78 tours des grands chanteurs des années 20 et 30 : Amelita Galli-Curci, Rosa Ponselle, Enrico Caruso, Tito Schippa, etc. Istomin en conserva un souvenir très vif, connaissant par cœur un grand nombre d’airs de Rossini, de Verdi et de Puccini, au point de pouvoir offrir un accompagnement improvisé à Luciano Pavarotti et Renata Scotto, un beau soir de mars 1977.

Tant qu’il était en activité, Istomin ne voulait pas écouter trop de musiques, car elles l’envahissaient trop intensément. Il avait prévu que, quand il se retirerait, il écouterait et approfondirait…  Il avait mis de côté nombre d’enregistrements et de partitions : les Symphonies de Mahler, Moïse et Aaron de Schoenberg, les opéras de Richard Strauss qu’il adorait et qu’il connaissait par cœur. Un jour, son ami Thornton Trapp l’avait trouvé en extase chez Jean-Bernard Pommier à Paris, écoutant Elektra (avec Montserrat Caballe) à haut niveau, ayant complètement oublié les voisins ! Il avait entendu l’enregistrement que Richard Strauss avait réalisé en 1906 sur piano mécanique d’extraits de Salome et il s’était amusé à transcrire aussi des passages de l’opéra. Les opéras de Mozart et Pelléas et Mélisande faisaient partie des musiques qu’il portait en lui, de même que les grands quatuors de Mozart, Beethoven, Schubert et Brahms, qu’il avait découverts à travers les 78 tours du Quatuor Busch et du Quatuor de Budapest.

Sinatra-et-Billie

Billie Holiday et Frank Sinatra

S’il protestait énergiquement contre la confusion des valeurs, qui entrainait certains à mettre sur le même plan les Beatles et Bach, Istomin n’avait aucun mépris pour les musiques non classiques !  Il s’intéressait un peu au jazz des années 30 et 40, mais il s’en lassait très vite. La seule qui l’émouvait vraiment était Billie Holiday. En revanche, il aimait beaucoup la musique populaire brésilienne et argentine, ainsi que le fado. Et il était fasciné par Frank Sinatra, malgré le peu de sympathie qu’il éprouvait pour le personnage, au point d’acheter son intégrale discographique. En tout cas, le dénominateur commun de ses intérêts dans les « autres » musiques était à nouveau l’attirance pour la voix…

De façon amusante, lors de ses Grandes Conversations en musique consacrées à la musique contemporaine,  il évoque l’importance des interprètes en mettant sur le même plan Sinatra, Casals et Horowitz !! Citant une phrase de Ned Rorem qui affirmait que les grands interprètes ont une personnalité unique, ineffaçable, il ajoute : « On ne peut pas faire que Billie Holiday ne soit pas Billie Holiday ! Que Frank Sinatra ne soit pas Sinatra ! Que Casals ne soit pas Casals! Que Horowitz ne soit pas Horowitz! Moi j’en ai la certitude, mais vous, compositeurs, qu’en pensez-vous ? Quelles conséquences en tirez-vous pour l’interprétation de votre propre musique, quelles qualités demandez-vous à vos interprètes? »   

Musique

Billie Holiday chante I wished on the Moon, un enregistrement de 1935 en compagnie notamment de Benny Goodman à la clarinette. Cette chanson fut reprise trente ans plus tard par Frank Sinatra, qui déclara à la mort de Billie Holiday : ‘C’est Billie Holiday qui était et qui reste ma plus grande influence musicale’.